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Alcoolique vs Malo: deux fermentations, un style

Par Anne
Vigneronne en Valais.
Deux fermentations, deux tempéraments. L’une met le feu aux poudres, l’autre peaufine les angles. Si vous avez déjà entendu « malo » au détour d’une cave, voici, en clair, ce qui se trame dans votre verre.
Deux fermentations, deux ambiances
La fermentation alcoolique, c’est le coup d’envoi. Les levures transforment le sucre du raisin en alcool et en gaz carbonique. Ça bouillonne, ça chauffe, ça sent la vendange fraîche. Sans elle, pas de vin. Elle crée l’énergie du cru, fixe le degré, révèle les arômes de fruits.
La fermentation malolactique, elle, arrive ensuite, plus calme. Des bactéries lactiques transforment l’acide malique (celui qu’on trouve dans la pomme verte) en acide lactique (plus doux, type yaourt). Résultat: l’acidité se détend, la texture gagne en rondeur. C’est un polissage, pas une révolution.
Comment les distinguer, sans s’arracher les cheveux
Pour mémoriser, retenez ces repères simples.
- Levures vs bactéries: alcoolique = levures; malolactique = bactéries lactiques.
- Sucre vs acidité: alcoolique consomme le sucre; malolactique adoucit l’acidité.
- Bulles vs velours: alcoolique fait bouillonner; malolactique lisse la texture.
- Indispensable vs optionnelle: l’alcoolique est nécessaire; la malolactique dépend du style recherché.
En deux mots: l’alcoolique fait le vin, la malolactique façonne son caractère.
Dans le verre: ce que ça change
Sur les rouges, la malolactique est presque toujours menée. Elle assouplit les tanins, assagit l’acidité, donne ce côté plus coulant. Un Pinot Noir gagne en soyeux, une Syrah prend un grain plus enveloppé.
Sur les blancs, c’est au choix. Un Chardonnay élevé en bois avec malo peut afficher des notes beurrées, de brioche, et une bouche ample. Si on bloque la malo, on garde du peps, des agrumes croquants, un profil plus droit. Ici, en Valais, certains Chasselas (Fendant) restent vifs et cristallins parce qu’on préserve cette fraîcheur. D’autres blancs, plus ronds, cherchent la caresse de la malo pour accompagner, disons, une volaille crémée.
Le choix du vigneron
On décide en fonction du cépage, de la maturité du raisin et du style visé. Année fraîche? La malo peut adoucir le trait. Année solaire? On peut la freiner pour garder du tonus. Techniquement, on joue sur la température, l’hygiène, parfois l’ensemencement: rien de sorcier, juste de la précision et du timing. Et oui, la malo vient après l’alcoolique: on ne polit pas un vin qui n’est pas encore né.
Conseil express pour vos dîners
Aimez-vous la tension citronnée avec les huîtres? Cherchez des blancs « vifs », souvent sans malo. Envie d’un blanc plus crémeux pour un risotto? Visez des chardonnays ou des blancs passés en barrique, avec malo. Et si l’étiquette ne dit rien, demandez au caviste: c’est son terrain de jeu.
Au fond, la différence entre fermentation malolactique et alcoolique tient en un duo bien rôdé: l’une donne la vie, l’autre l’équilibre. Deux étapes, une même quête: mettre en bouteille un paysage, une saison, et ce petit supplément d’âme qui fait revenir le nez au verre.
